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Magma Gabriel Konaté : « Entre la culture arabo-musulmane et la culture judéo-chrétienne, quelle est la culture malienne ? »

À la session plénière du Conseil national de Transition (CNT), jeudi 11 mars 2021, le président de la commission culture et la ministre de la Culture, de l’Artisanat et du Tourisme ont eu des échanges sur la culture malienne dans le contexte de la mondialisation. Magma Gabriel Konaté déplore l’installation d’une véritable « acculturation ».

« Les discours souvent tenus qualifient le Mali de terre de grandes cultures. Cependant, il n’y a pas un développement politique, économique et social sans un rayonnement culturel adéquat. Mais chez nous au Mali quand l’on parle de culture, nombre de Maliens pensent folklore. Alors entre la culture arabo-musulmane et la culture judéo-chrétienne, quelle est la culture malienne ? », demandait Magma Gabriel Konaté à la ministre de la Culture, de l’Artisanat et du Tourisme, Kadiatou Konaré, lors de la session plénière des membres du CNT, le jeudi 11 mars 2021.
Le Mali, « berceau des arts et de la culture »
Cette question du président de la commission culture du Conseil national de la Transition visait à savoir ce qui reste encore de la culture malienne après son contact avec les cultures étrangères. Selon Kadiatou Konaré, « la culture malienne est le fruit d’un long voyage entamé depuis la nuit des temps et qui se nourrit de rencontres, d’échanges. Une culture millénaire, mais brassée, métissée, de tolérance qui ne s’est jamais fermée aux apports du monde externe ».
Selon ses précisions, la culture malienne s’est enrichie au contact des autres. Une idée approuvée par Magma Gabriel Konaté, qui soutient que le contact avec les autres est preuve de progrès, d’amélioration. Ce qui amène la ministre Konaré a déclaré : « Si l’Afrique est le berceau de l’humanité, le Mali est certainement le berceau des arts et de la culture en Afrique ».
« Même nos prénoms n’ont plus de significations »
Néanmoins, l’homme de cinéma malien rappelle cette interrogation de Cheick Amidou Kane, dans « L’Aventure ambiguë » : « Ce que l’on apprend de la culture d’autrui vaut-il ce que l’on oublie de soi ». Au contact avec les autres cultures, certains groupes ont perdu jusqu’au nom des jours ainsi que des prénoms, déplore l’honorable Konaté : « Même nos prénoms n’ont plus de significations et ne justifient plus notre identité ».
Faisant référence à l’ouvrage « Les noirs et la culture » de Fily Dabo Sissoko, dans lequel on parle du « paradoxe des religions révélées », l’honorable Konaté déplore l’installation d’une véritable acculturation au Mali. « Fily Dabo, ce grand penseur malien, dit que pour avoir accès à Allah, nous devons passer par le prophète Mahomet, paix et salut sur lui. Il est l’intercesseur pour avoir accès à Allah. Pour avoir accès à Dieu, il faut passer par Jésus. Au nom du Père, du Fils (qui intercède pour nous) et du Saint-Esprit. Le fils est intercesseur », explique-t-il avant de demander pourquoi on interdit aux Africains d’avoir leurs dieux comme intercesseur auprès du Maa, le maître créateur. La croyance au Maa, a-t-il indiqué, ne fait pas du noir un animiste.
Selon ses précisions, au sud du Sahara, une véritable confusion existe entre la culture arabe et la religion arabe. Il estime qu’entre les deux, « on en a fait un syncrétisme » qu’il appelle « crétinisme ».
Magma Gabriel Konaté ne fait aucun doute que les Maliens ont perdu les repères. « Notre culture, nous l’avons perdue pour celle de l’autre, du colonisateur », a-t-il précisé. C’est cela « la pauvrétitude », être au service de la culture des autres, mais pauvre de ses propres cultures.
Crise éducative
Le célèbre acteur de cinéma malien attribue toutes ces confusions, ayant conduit aujourd’hui à cette « acculturation » à une crise éducative. « Lorsqu’un peuple ne contrôle pas son éducation, quand il n’a pas la maîtrise des mécanismes de socialisation de ses enfants pour leur transmettre le savoir-être et le savoir-faire. Lorsque c’est un autre qui se substitue à lui pour le faire, son acculturation est amorcée de façon inexorable », souligne-t-il.
Au Mali, a-t-il précisé, « nous pensons en français pour agir et interagir dans nos langues ». À ses dires, une véritable confusion s’installe entre enseignements, « Kalan », et l’éducation, « Lamon ». C’est ce qu’il explique à travers cette distinction entre les deux lieux de la formation de l’enfant : l’école, qui est le lieu de la formation pour l’acquisition du savoir universel, et la famille où les mécanismes de socialisation sont exercés et qu’on appelle le « Lamon ».
Fousseni Togola

Source : phileingora

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